Avril 1953. Alors que les négociations de paix à Panmunjon, en Corée, piétinent, les troupes chinoises s'emparent d'une colline, Pork Chop Hill, et taillent en pièces la compagnie américaine qui la défendait. Le lieutenant Clemons (Gregory Peck) reçoit l'ordre de reprendre immédiatement la colline dans une contre-attaque démarrant de nuit, avec la King Company...
Pork Chop Hill (que la traduction française transcrit en La Gloire et la Peur, pour s'éviter la côte de porc sans doute...) est le dernier film de guerre réalisé par Lewis Milestone, après A l'ouest rien de nouveau, A Walk in the Sun ou Halls of Montezuma. Le film est adapté du livre de l'historien militaire S.L.A. Marshall, officier de l'US Army, auteur de nombreux travaux sur le combat d'infanterie durant les deux guerres mondiales et la guerre de Corée. Marshall privilégiait l'histoire orale et l'interrogatoire de groupe au sein des unités pour faire émerger un récit. Sa méthode a été controversée après a mort.
La bataille de Pork Chop Hill, dont s'inspire le film, a lieu entre mars et juillet 1953, à la fin de la guerre de Corée. La 7ème division d'infanterie américaine tient cette colline, en position avancée sur la principale ligne de résistance face aux Nord-Coréens et aux Chinois. En face se trouvent les 141ème et 67ème division chinoises, unités entraînées aux assauts de nuit, embuscades, patrouilles et guerre de montagne. Les Chinois vont s'emparer de cette position pour montrer leur volonté de négocier le plus tard possible l'armistice. Les Chinois commencent par prendre, en mars 1953, une colline proche, "Old Baldy", lors d'une rotation de deux compagnies colombiennes. Entourant de fait Pork Chp Hill sur trois côtés, ils lancent un bataillon du 201ème régiment, la nuit du 16 avril, contre la compagnie E du 31st Infantry qui tient la colline. La compagnie K de Clemons, appuyée par la compagnie L, parvient à reprendre la position mais avec de terribles pertes ; un cafouillage dans les communications entre les échelons du commandement fait retirer à Clemons la compagnie G qui avait été mobilisée pour l'aider à tenir la position. Réduite à 10 hommes, la compagnie K est relevée par d'autres du 17th Infantry, qui vont devoir affronter les contre-attaques chinoises jusqu'au 18 avril.
Le film marque les débuts importants de plusieurs acteurs promis à une longue carrière : Harry Guardino (que l'on retrouve dans L'enfer est pour les héros quelques années plus tard ; George Shibata, qui joue l'officier opérations de la compagnie K dans le film, camarade de classe à West Point de Clemons, qui sert de conseiller technique sur le film. Marshall regrette d'avoir vendu les droits de son livre pour une somme à ses yeux trop modique. La représentation des deux soldats afro-américains de la compagnie K (Woody Strove et James Edwards) fait écho à l'histoire du 24th Infantry Regiment, unité entièrement composée de Noirs et appliquant donc encore la ségrégation, mal armée, mal entraînée, qui finit par être dissoute. Les Noirs sont alors répartis dans d'autres unités comme on le voit dans le film. Ce dernier a été tourné pour partie en Californie ; Peck a dirigé lui-même certaines séquences en dépit des récriminations de Milestone.
Milestone avait en quelque sorte réinventé le genre du film de guerre avec A l'ouest, rien de nouveau (1930). Il avait également marqué de son empreinte le genre, de nouveau, avec A Walk in the Sun (à budget restreint), mais aussi Edge of Darkness, réalisé pendant la guerre (1943). Pour Pork Chop Hill, il rencontre Gregory Peck, star unique en son genre à Hollywood. Milestone ne fera pas de son film sur la guerre de Corée une production ressemblant à celles de Fuller, ou même à celle d'Anthony Mann : le propos, comme le livre de Marshall, se concentre sur le comportement des hommes face au combat. Dans un contexte particulier : tout le monde sait alors que les négociations d'armistice peuvent aboutir d'un moment à l'autre, et peu de soldats américains ont envie d'être les derniers morts du conflit. Et pourtant, devant l'assaut chinois, les officiers mènent leurs compagnies à la charge pour reprendre une colline sans aucune importance stratégique, hormis celle de négocier en position de force. Milestone oppose le communiste chinois, qui lance ses unités vague après vague quelles que soient les pertes, aux Américains à court d'hommes, mais qui pleure chaque perte, parfois victime des défaillances de leur commandement ou de leur soutien (artillerie qui tire trop court). C'est ici une guerre de fantassins, sans char, sans aviation, où chaque mètre gagné l'est au prix du sang de l'infanterie. Milestone a d'ailleurs bien choisi les rôles secondaires qui encadrent Peck, dans la compagnie K (on reconnaît George Peppard). Le film ne comprend sans doute pas les meilleures scènes de combat du réalisateur, mais il sait maintenir la tension, avec l'usage de la guerre psychologique par les Chinois, l'interrogation sur l'issue des négociations et sur le qui sortira vainqueur.
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