La
Garde Nationaliste Arabe fait partie de l'éventail de milices
pro-régime syrien composées de combattants étrangers apparues à
partir de 2013 pour soutenir les forces de Bachar el-Assad à bout de
souffle, et notamment à courts d'effectifs. Reposant sur une
idéologie arabe nationaliste, antisioniste et pro-Palestine, cette
formation a mis en ligne 4 bataillons qui sont intervenus depuis 3
ans sur la plupart des fronts importants pour le régime syrien. La
milice se démarque par ce discours idéologique, une proximité avec
le régime, et des recrues qui viennent pour l'essentiel du Proche et
Moyen-Orient.
Historique
La
Garde Nationaliste Arabe (GNA), milice créée pour soutenir le
régime syrien, est constituée de personnes adhérant encore à une
certaine idée du nationalisme arabe au Moyen-Orient et au Maghreb1.
Dans l'article qu'Aymenn Jawad al-Tamimi avait consacré à GNA en
janvier 2014, un militant égyptien explique que cette milice a été
formée en avril 2013 (mai selon d'autres sources2)
par des membres de la Jeunesse Nationaliste Arabe de plusieurs pays,
et que 4 bataillons ont été constitués, portant les noms de
« martyrs » : Wadih Haddad, Haydar al-Amali,
Mohamed Brahmi, et Jules Jammal. Mohamed Brahmi est un politicien
tunisien laïc qui a fondé le Mouvement Populaire après la chute de
Ben Ali. Il a été assassiné en juillet 2013. Wadih Haddad,
Palestinien chrétien, a milité au Front Populaire de Libération de
la Palestine (FPLP), connu pour ses détournements d'avions dans les
années 1960-1970. Jules Jammal était un chrétien de la marine
syrienne qui aurait coulé un navire français durant les combats de
la guerre de Suez en 1956. Haydar al-Amali était un penseur
nationaliste libanais décédé en 2007 après ses blessures reçues
dans la guerre de 2006 entre le Hezbollah et Israël. GNA aurait été
formée par Abu A’ed, un nationaliste arabe libanais du sud du
pays, à Jabal Amal, après les frappes israëliennes en Syrie3.
C'est un vétéran du combat contre les Américains en Irak après
2003. Le Camp de la Jeunesse Nationaliste Arabe dont est tirée GNA
est lui-même issu du Mouvement Nationaliste Arabe fondé par George
Habache, un intellectuel palestinien marxiste : le mouvement est
panarabe et antisioniste.
L'idéologie
du groupe, en plus du nationalisme arabe, reprend la rhétorique du
régime syrien d'agression impérialiste contre Assad, et rajoute en
plus comme objectif la libération de la Palestine. La propagande du
groupe aime utiliser les grandes figures du nationalisme arabe :
Nasser, mais aussi Saddam Hussein, en plus du Hezbollah et de Bachar
el-Assad. La Jeunesse Nationaliste Arabe fournit des recrues venant
de Sidon, au Liban, de Gaza, et de l'Egypte. GNA, qui comprend des
recrues venant d'Egypte mais aussi d'Irak, opère sur une bonne
partie du territoire syrien : Damas, Alep, Homs et Deraa. Elle
se concentre surtout à Damas en 2013-2014, participant notamment à
l'offensive dans le Qalamoun. Comme souvent, les martyrs sont mis à
l'honneur dans la propagande, comme Aamer Eid Abdullah - "Abu
Nasir", tué en novembre 2013. GNA comprend aussi, d'après
le journal libanais al-Akhbar, des recrues libanaises. Les
camps d'entraînement de GNA auraient été installés dès mai 2013
sur le mont Qasioun, à Damas : les miliciens sont encadrés par
l'armée syrienne. Le recrutement de Palestiniens et d'Egyptiens se
serait accru après la menace de frappes aériennes américaines en
août 2013 contre le régime syrien, qui venait d'utiliser des armes
chimiques dans la Ghouta à Damas. GNA comprend, en plus des autres
nationalités déjà mentionnées, des Tunisiens, des Yéménites, et
des Syriens, aussi. En mai 2014, al-Akhbar
lui donne un effectif d'un millier d'hommes, qui aurait
déjà perdu près de 50 combattants tués. Les recrues sont jeunes,
entre 18 et 30 ans, avec quelques-unes de 16-17 ans, encadrées par
des hommes plus âgés passés par les armées égyptienne ou
irakienne. On trouve par exemple un ex-officier de l'armée
égyptienne âgé de 36 ans. La GNA a combattu aux côtés du
Hezbollah ou du Parti Social-Nationaliste Syrien. La GNA dispose
d'une branche féminine : 70 recrues en mai 2014, âgées de 19
à 35 ans, assurant notamment des tâches de sécurité à l'arrière
(contrôle des checkpoints, etc). A la mi-mai 2014, la Garde
Nationaliste Arabe est engagée sur le front de Mleha, dans l'est de
la Ghouta. Comme la milice irakienne Liwa Assad Allah al-Ghaleb à
la même époque, elle utilise des roquettes Volcano4.
Je
n'ai pas retracé tout le parcours de la formation depuis début
2014, date où
je l'avais déjà évoquée sur mon blog, aussi je me suis
concentré sur l'année 2016 pour donner une idée de l'engagement
militaire de GNA en Syrie. En mai 2016, GNA combat à Darayya, au sud
de Damas, où l'unité perd un de ses commandants5.
En juin, elle a des combattants à la fois sur le front de Palmyre, à
Darayya et à Ithriya où elle subit manifestement des pertes lors de
la contre-attaque de l'EI pour bloquer la poussée du régime sur
Raqqa6.
Un bataillon est aussi présent dans la Ghouta orientale. En juillet,
le bataillon Brahmi combat à Alep. En août, GNA combat toujours
dans la Ghouta occidentale. Le bataillon Mohamed Brahmi lui est
engagé contre l'EI à l'est d'Alep. Début septembre, une unité au
moins de GNA est présente dans les combats à Alep. Le 6 octobre
2016, une vidéo du groupe indique qu'une partie au moins de GNA
combat à l'est d'Alep avec le régime syrien. Le 14 octobre, des
photos montrent que le bataillon Haydar opère de concert avec la
4ème division blindée du régime (42ème brigade) à Aldarkbbia.
Une vidéo du 18 octobre 2016 indique qu'un bataillon au moins de
GNA, Haydar al-Amali, opère dans la Ghouta occidentale à Damas,
toujours à Aldarkbia.
Propagande
GNA
dispose de sa propre page Facebook7,
régulièrement mise à jour et proposant une abondante iconographie
qui confirme l'idéologie de la formation récapitulée ci-dessus.
En juin 2016, Bachar el-Assad est photographié en visite auprès de
GNA dans la Ghouta orientale. La cause de la Palestine est souvent
évoquée (15 août). Les portraits et les discours de Nasser
apparaissent souvent sur le mur de GNA, comme le 20 août 2016. La
Jeunesse Nationaliste Arabe défile, avec drapeaux et bras tendus, à
Qardaha, fief natal d'Assad, le 1er septembre 2016. Le 10 septembre,
des miliciens de GNA accompagnent des représentants du régime chez
les Druzes de la province de Suweida. Le portrait de Bachar el-Assad
apparaît souvent en fond es photos ou autres montages, comme sur ce
cliché du 16 septembre. Le 17 septembre, GNA reçoit à Alep le
sheikh Akraam al-Kaabi, le chef de la milice irakienne chiite Harakat
Hezbollah al-Nujaba qui combat aussi dans le secteur pour le
régime syrien. Le 21 septembre, un poster honore Mahmoud Kassem,
« martyr » tombé dans les combats en Syrie. Le 23
septembre, un convoi funéraire rassemble de nombreux véhicules et
militants de la formation. Les cercueils sont salués par un bras
droit tendu. 2 autres « martyrs » sont honorés le
14 octobre. Une photo du 15 octobre montre l'enterrement de 2
« martyrs » de GNA. Parmi eux, sans doute ce mort
au combat qui a droit à son poster de propagande le même jour.
Effectifs,
équipement, tactiques
GNA
ne communique pas énormément sur ses opérations militaires, ou en
tout cas ne les montre pas dans le détail, visuellement parlant.
D'après ses publications de propagande, on déduit que GNA est
essentiellement une force d'infanterie, avec AK-47, mitrailleuses PK
et RPG-7 surtout. Les véhicules blindés sont fournis, en appui, par
le régime syrien, comme ce char visible sur une vidéo d'octobre
2016. Le 1er octobre, une photo montre cependant un combattant de GNA
à côté d'un lance-missiles antichars Kornet. Une photo du
13 octobre 2016 laisse penser que GNA dispose peut-être de fusils
anti-sniping Sayyad 2/AM 50 de 12,7 mm iraniens. Les effectifs, sans
être très fournis, permettent visiblement d'alimenter les 4
bataillons qui composent la formation et qui sont déployés sur
différents fronts.
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