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samedi 17 février 2018

Les cavaliers (The Horse Soldiers) de John Ford (1959)

1863, pendant le siège de Vicksburg, durant la guerre de Sécession. Les généraux Grant et Sherman ordonnent au colonel Marlowe (John Wayne) de conduire une brigade de cavalerie derrière les lignes confédérées pour détruire la base de ravitaillement des sudistes à Newton Station. Grant envoie le chirurgien-major Kendall (William Holden) pour s'occuper des blessés de Marlowe. Deux fortes personnalités qui se retrouvent face-à-face pendant ce raid épique...






Les cavaliers est un western assez librement inspiré du roman du même nom d'Harold Sinclair (1956). Ce roman s'inspire lui-même d'un fait authentique : le raid de 17 jours du colonel Benjamin Grierson, avec 3 régiments de cavalerie nordiste, conçus comme une diversion à l'attaque principale sur Vicksburg. Grierson traverse le territoire confédéré du sud du Tennessee en passant par le Mississipi et jusqu'à Bâton-Rouge en Louisiane, semant la destruction sur son passage. Le célèbre chef de cavalerie confédérée Nathan Bedford Forrest ne peut arrêter le raid des 1 700 hommes de Grierson, étant lui-même aux troupes d'un autre raider nordiste. Pemberton, le commandant de la garnison de Vicksburg, doit immobiliser des troupes pour surveiller sa principale voie de chemin de fer pour le ravitaillement, et doit consacrer des troupes à repousser une autre feinte de Sherman, ce qui laisse le loisir à Grand d'opérer un débarquement pour refermer l'étau sur Vicksburg.




Le tournage du film, qui se fait en Louisiane et au Mississipi, est compliqué. Ford et Holden ne cessent de se quereller. Wayne est déjà préoccupé par son projet de film sur fort Alamo. Althea Gibson, ancienne championne de tennis qui tient le rôle secondaire de la servant noire de la jeune femme de l'aristocratie confédérée, est révoltée par son script qui lui fait adopter un parler d'esclave caricatural, et obtient de Ford son annulation. Pendant le tournage de la scène finale, un cascadeur, Fred Kennedy, se brise la nuque en tombant de cheval et meurt. Dévasté, Ford ne tourne pas la scène ultime de l'arrivée des cavaliers nordistes, sous les vivats, à Bâton-Rouge. Le film ne connaît pas un grand succès à sa sortie.






Il faut dire que Ford ne s'est mis que très tardivement à son premier film évoquant directement la guerre de Sécession. La production est investie par 6 (!) compagnies différentes, dont celles des deux scénaristes. Wayne et Holden demandent des cachets astronomiques, bien supérieurs à celui de Ford qui en conçoit une certaine rancoeur(Wayne cherche aussi de l'argent pour financer Alamo). D'après le témoignage de la femme de Wayne, Pilar, qui fera une crise de démence sur le plateau de tournage après avoir repris son abus de somnifères, son mari boit pendant le tournage, ce qu'il ne faisait jamais, de même que Holden, puis Ford, dévasté par la mort de Kennedy. Si Les cavaliers est en général mal considéré dans la filmographie de Ford, il entretien pourtant un jeu subtil sur la psychologie des personnages : Marlowe, ancien travailleur des chemins de fer, officier issu du rang, se voit condamné à ravager l'infrastructure ferroviaire et à assumer de lourdes responsabilités tout en étant torturé par la mort de sa femme ; Kendall, médecin fidèle à son devoir est en même rétif à l'autorité parfois violente de Marlowe. Constance Tower, qui incarne Hannah Hunter, l'aristocrate confédérée, représente le civil qui découvre l'horreur de la guerre : d'abord farouche partisane du Sud, puis aidant à soigner les blessés après la bataille, perdant sa suivante noire tuée par des franc-tireurs confédérés, avant de tomber amoureuse du colonel nordiste. Le film est plein de rebondissements et sait entretenir la tension : l'arrivée du train sudiste à Newton Station, l'intervention des cadets de l'école militaire confédérée, véritable scène d'anthologie. Le final peut décevoir quelque peu, mais il s'explique par la situation du tournage décrite ci-dessus. Les cavaliers reste donc un film à revoir, et à apprécier pour ce qu'il est : une oeuvre sombre.

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