" Historicoblog (4): Tir à vue (Shoot) de Harvey Hart (1976)

mardi 18 avril 2017

Tir à vue (Shoot) de Harvey Hart (1976)

Rex (Cliff Robertson), ancien major et vétéran du Viêtnam, passionné d'armes à feu, part à la chasse sur la frontière canadienne avec 4 amis, eux aussi anciens vétérans, dont Lou (Ernest Borgnine) et Zeke (Henry Silva). Bredouilles, ils croisent un autre groupe de chasseurs. Sans raison, un de ces derniers tire sur eux ; le groupe réplique et Zeke abat l'un des agresseurs d'une balle en pleine tête. Après avoir soigné un de leurs camarades blessés, ils décident de ne rien dire à la police, mais Rex est rapidement convaincu que leurs agresseurs ne vont pas en rester là...

Inspiré d'un roman de Douglas Fairbairn, Shoot vaut assurément le détour de par son thème. Il montre en effet les dérives d'une société où les armes à feu sont en vente libre, et ce qu'il peut en advenir quand des vétérans mal réinsérés décident de s'en servir. Le début du film amène bien la tension jusqu'à la rencontre des deux groupes de chasseurs : la chute peut paraître un peu grosse (pourquoi des chasseurs tireraient sur d'autres sans avoir échangé aucun mot au préalable ; Southern Comfort, tourné quelques années plus tard, est de ce point de vue un peu plus crédible) mais elle structure tout le film. Plus qu'un message sur le problème posé par la prolifération des armes à feu, le film tient du propos sur les vétérans du Viêtnam et sur les rapports très locaux dans la société américaine dans de petites communautés finalement assez conservatrices, comme le montrent plusieurs passages du film.

Le scénario repose en effet sur les réflexes militaires de Rex, l'ancien officier du groupe de vétérans, plus attaché aux armes et à ses soldats qu'à son épouse. De fait, plutôt que de prévenir la police et de soigner leur ami à l'hôpital, il décide de ne rien dire et de faire appel à un ancien camarade pour panser le blessé. Cliff Robertson incarne à merveille l'officier paranoïaque, persuadé que les agresseurs ne vont pas en rester là, et qui utilise les moyens de la Garde Nationale qu'il encadre pour monter une opération militaire sur les lieux de l'incident afin de débusquer les tireurs. Les scènes de flirt rejeté avec la femme d'un de ses compagnons et la visite à la veuve de l'assaillant tué (où l'on comprend que ceux qui les ont agressés sont aussi des vétérans du Viêtnam et probablement des suprémacistes blancs) ne servent qu'à nous faire comprendre, par clin d'oeil, que le groupe adverse surveille Rex pour préparer lui aussi la bataille. L'heure au milieu du film manque de rythme, encadrée par les deux scènes de tirs du début et de la fin ; dommage aussi que le réalisateur n'exploite pas mieux le décor (le film a été tourné dans l'Ontario).

Face à Rex, le personnage de Lou (Ernest Borgnine), le seul un peu travaillé lui aussi, questionne les motivations de son ancien chef et doute jusqu'au bout, avant de rejoindre ses amis sur le chemin du lieu de l'embuscade. Rex rassemble d'anciens vétérans et de jeunes recrues, armés de bric et de broc (le stock de la Garde Nationale : fusils M1 Garand, MP40, fusil mitrailleur BAR, pistolets-mitrailleurs Ingram), à bord d'un camion et d'une Jeep, pour revenir sur les lieux du drame. Les jeunes recrues finissent par se lasser alors que tout est calme sur les lieux. Puis c'est le dénouement : en face, les autres sont arrivés les premiers, en tenue camouflée (il y a de la neige au sol), et se sont cachés dans des trous recouverts de tôle dissimulés sous la neige, avec des armes automatiques plus modernes et des mortiers. Rex, blessé, est le seul survivant : le thème du film se résume dans les dernières phrases, où sur son lit d'hôpital, il regrette de ne pas être arrivé en premier sur les lieux (!) pour avoir l'avantage.
















Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.