" Historicoblog (4): David C. HINZE et Karen FARNHAM, The Battle of Carthage. Border War in Southwest Missouri, July 5 1861, Pelican Publishing Company, 2004, 314 p.

dimanche 13 août 2023

David C. HINZE et Karen FARNHAM, The Battle of Carthage. Border War in Southwest Missouri, July 5 1861, Pelican Publishing Company, 2004, 314 p.

 

Réédition d'un ouvrage paru en 1997, ce volume de 2004 retrace les origines, le déroulement et les conséquences de la bataille de Carthage, une des premières batailles rangées de la guerre de Sécession livrée dans le Missouri, à l'ouest des Etats-Unis, le 5 juillet 1861.

Le but des auteurs (Hinze est un professeur d'histoire dans le secondaire, qui a consacré beaucoup de temps aux recherches sur Carthage) est de montrer que cette bataille, pourtant faible dans son ampleur, a eu des conséquences certaines sur le déroulement de la guerre dans cet Etat critique car frontalier entre l'Union et la Confédération, et pour tout le théâtre trans-Mississipi du conflit.

Le Missouri est en effet à l'image du pays, très divisé avant la guerre de Sécession. La partie est, dominée par la ville de Saint-Louis, est très liée au Nord. Elle compte par ailleurs une importante communauté immigrée allemande, les vaincus des révolutions de 1848, soutiens de l'Union. Le reste de l'Etat, plutôt esclavagiste, a donné ses votes au gouverneur Jackson élu sur une position modérée, mais qui en sous-main, prépare le ralliement du Missouri au Sud si la guerre doit éclater. Chaque camp entraîne des milices, et garde en point de mire le dépôt fédéral de Saint-Louis, qui permettrait à l'un ou l'autre camp d'équiper correctement une armée.

 

Après le bombardement de Fort Sumter, les choses s'accélèrent. L'Union peut compter sur la présence de Frank Blair, membre du Congrès et proche de Lincoln, qui fait venir sur le théâtre un militaire dont l'action va être décisive : Nathaniel Lyon. Ce dernier s'assure du contrôle du dépôt de Saint-Louis et disperse la milice pro-sécessionniste dans la ville. Le gouverneur Jackson ordonne alors la levée de la milice d'Etat du Missouri, qui va recruter dans l'intérieur de l'Etat, plutôt acquis au sud. Jackson en confie le commandement à un vétéran de la guerre du Mexique, Sterling Price. Malheureusement, ce dernier tombe malade et c'est Jackson, politicien et pas du tout militaire, qui se retrouve à la tête d'une milice mal armée et mal équipée, qui aurait même compris un Noir libre et refusé des femmes à l'enrôlement (!), qui voulait suivre leurs compagnons. Lyon prend les devants, remonte le Missouri en bateau et en débarquant, inflige une première défaite à ses adversaire à Boonville, le 17 juin 1861. Cette escarmouche a pour effet de précipiter le repli de Jackson au sud-ouest du Missouri, en deux colonnes partant de Boonville et de Lexington.

Jackson veut rallier l'armée confédérée qui est en train de s'assembler dans le nord de l'Etat voisin de l'Arkansas. Lyon part à la poursuite de Jackson et envoie une deuxième colonne, commandée par le général Sweeney, pour encercler les forces de Jackson et les détruire avant qu'elle n'ait ralliée l'armée confédérée de l'Arkansans. Mais Lyon, bon tacticien, a négligé comme beaucoup d'autres officiers du début de la guerre de Sécession la logistique. Les deux colonnes avancent péniblement, et Sweeney lègue au colonel Sigel, avec 1 100 hommes, la tâche de foncer en avant pour couper la retraite de Jackson au sud-ouest du Missouri.

Les deux colonnes confédérées se rassemblent à Lamar, au nord de Carthage, le 3 juillet. Elles regroupent peut-être 6 000 hommes, dont à peine 4 000 sont armés. Sigel, qui est entré dans Carthage, rencontre les éclaireurs sudistes dans la nuit du 4 au 5 juillet : le lendemain, il marche avec ses 1 100 hommes et 8 pièces d'artillerie au nord de la ville. La bataille va se dérouler de cet endroit jusqu'au au sud-est de l'agglomération, sur la journée. Sigel fait ranger son armée de manière très napoléonienne et un duel d'artillerie a lieu pendant une demi-heure. La cavalerie sudiste, aux deux ailes, essaie d'envelopper Sigel, qui n'a que de l'infanterie et de l'artillerie. Ce dernier, vétéran des révolutions de 1848, a déjà eu l'occasion d'organiser des retraites sous le feu. Il se replie sur un premier gué, Dry Ford Creek, et utilise son artillerie pour maintenir les adversaires à distance. La cavalerie sudiste, mal organisée et mal équipée, ne peut emporter la décision et Sigel peut évacuer vers Carthage les 32 chariots de son train de ravitaillement et une grosse partie de son infanterie.


 

Après un autre duel d'artillerie et un combat de fantassins, Sigel, qui craint toujours l'encerclement par la cavalerie, se replie sur Buck's Branch Creek. 500 à 700 cavaliers sudistes l'y attendent, ayant effectivement tourné sa position. Sigel arrive à forcer le passage et se retranche sur la Spring River, arrêtant de nouveau la progression sudiste. Une bataille rapide a lieu à l'entrée ouest de Carthage, avant que Sigel ne se replie par la route du sud-ouest vers Sarcoxie, abandonnant la ville aux Confédérés.

Les pertes sont relativement légères au vu des effectifs déployés. Cependant, la défaite nordiste permet aux troupes d'Etat du Missouri (qui ne sont pas encore confédérées) de faire la jonction avec l'armée confédérée de l'Arkansas de McCullock, laquelle battra l'armée nordiste à Wilson's Creek un peu plus tard, bataille où Lyon trouvera la mort. A Carthage, Sigel a été sauvé par la meilleure discipline de son infanterie, par ailleurs mieux armée, et l'excellence de son artillerie. Les sudistes n'ont pu profiter de leur avantage en cavalerie, qui n'était pas encore bien organisée, bien armée et bien commandée - même si certaines unités ont fait mieux, comme celle menée par Jo Shelby, promis à un brillant avenir dans la cavalerie confédérée. L'infanterie était mal armée et mal équipée, mal commandée, contrairement à l'artillerie, certes mal équipée mais où opère des officiers de valeur.

Un livre bien mené, pourvu de nombreuses cartes et illustrations, d'un ordre de bataille de chaque camp en annexes, avec près de 40 pages de notes et une bibliographie aussi exhaustive que possible - la bataille n'a pas laissé beaucoup de témoignages de combattants ni de rapports après combat des officiers impliqués, difficulté que les auteurs ont dû surmonter. Une interview de David Hinze figure en fin d'ouvrage également.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.