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dimanche 13 août 2023

Rome ville ouverte (1945) de Roberto Rossellini

 

Rome, 1944 (ville ouverte depuis août 1943, d'où le titre). Le chef d'un réseau de résistance communiste, Manfredi (Marcello Pagliero), traqué par la Gestapo, trouve refuge chez son ami Francesco (Francesco Grandjacquet), un imprimeur clandestin, qui doit se marier avec Pina (Anna Magnani), une veuve avec un fils issu de son premier mariage. Pina met en contact Manfredi avec Don Pietro (Aldo Fabrizi), le curé de la paroisse, résistant lui aussi. Le fils de Pina, avec des enfants du quartier, participe à des actions de résistance spontanée...

 




Rome, ville ouverte, est considéré comme le premier film du néoréalisme italien - il fait partie de la trilogie de la guerre de Rossellini, comme on l'a appelé, avec Païsa et Allemagne, année zéro. Tourné avec très peu de moyens, dans un style quasi documentaire, le film a remporté le grand prix à Cannes en 1946. Le tournage commence en janvier 1945 dans une Rome à peine remise de l'occupation allemande, comme le montre les destructions des bâtiments, et alors que la guerre continue dans le nord de l'Italie. Le film est financé par un marchand de laine. Rossellini manquant de pellicule, c'est un soldat américain du corps des transmissions qui complète son stock.


 

 

Le titre du film est emprunt d'ironie : bien que ville ouverte depuis l'été 1943, Rome connaît la répression allemande contre les actes de résistance, les rafles de Juifs, les exécutions sommaires... Rossellini, jouant sur l'aspect moral, veut montrer cette atmosphère de peur que vivent les Italiens loin du front, à Cassino et à Anzio, dans la lutte quotidienne pour la survie, avant même la résistance... l'aspect documentaire se voit dans le scénario, inspiré de faits réels (Rossellini, avant le film, avait envisagé des documentaires sur ceux-ci), et l'embauche de non professionnels pour la plupart des rôles (sauf Magani et Fabrizi).

 


 

 

Film s'occupant d'abord de scènes de vie quotidienne de l'occupation à Rome, le propos bascule ensuite sur la résistance avec une finalité morale. C'est en effet la pauvreté, ou plutôt la peur de la pauvreté, qui pousse des Italiens à dénoncer leurs compatriotes, à les faire torturer (la scène de torture de Manfredi est d'une violence surprenante pour l'époque) et tuer. Rossellini insiste sur la figure du prêtre, qui devient en quelque sorte le martyr de l'Italie, prête à renaître sur les décombres du fascisme avec des valeurs humaines et chrétiennes. Il n'hésite pas d'ailleurs à faire périr quasiment tous les personnages principaux pour le propos. Restent les enfants, résistants en devenir, perdus au milieu d'un univers qui s'écroule autour d'eux. En montrant les Italiens forts, qui ne parlent pas, sous la torture, aboutissement tragique de cette vie de clandestinité, l'équipe de réalisation a aussi fait oeuvre autobiographique, plusieurs -dont Rossellini - ayant connu tout ou partie de la situation pendant la guerre. C'est aussi qu'il s'agit de rejeter les films de propagande - Rossellini en a fait quelques-uns pour le régime fasciste - et de divertissement de l'ère mussolinienne.

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